médicament | Child A | Child B | Child C |
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Ézétimibe | Utiliser avec précaution | Non recommandé | Non recommandé |
Selon la monographie, l’ézétimibe doit être utilisé avec précautions et la fonction hépatique doit être évaluée chez les patients qui présentent des signes ou des symptômes d’hépatite. En effet, de rares cas d’hépatites médicamenteuses ont été signalés. Toutefois, dans les études contrôlées, la fréquence des élévations significatives des transaminases sériques s’est avérée comparable au placebo. Toujours selon la monographie, son utilisation est contre-indiquée en combinaison avec une statine chez les patients présentant une atteinte hépatique évolutive ou une élévation persistante ou inexpliquée des transaminases hépatiques. Pour ces raisons, l’ézétimibe est considéré à risque de causer des lésions hépatiques médicamenteuses. (Speliotes 2018) Le risque d’hépatotoxicité est donc à prendre en considération lors de l’utilisation de cet agent chez les patients cirrhotiques. Les études suggèrent de suivre étroitement la fonction hépatique chez les patients avec atteinte hépatique chez qui on initie l’ézétimibe et ce, en concomitance ou non avec une statine. (Ritchie 2008) De plus, les conséquences d’une augmentation de l’exposition à l’ézétimibe sont inconnues, justifiant d’autant plus la prise de précautions supplémentaires en contexte de cirrhose légère. (Kosoglou 2005)
Il est intéressant de mentionner que certaines études ont tenté d’évaluer l’effet de l’ézétimibe sur la stéatose hépatique non-alcoolique. Les résultats demeurent cependant contradictoires concernant son efficacité à normaliser le bilan hépatique et les désordres histologiques et son utilisation dans ce contexte n’est pas officiellement recommandée. (Nakade 2017, Loomba 2015)
Absorption |
Comprimés à libération immédiate :
Dose unique de 10 mg per os (monographie)
Métabolite ézétimibe glucuronide (monographie)
Dose unique de 10 mg per os (Kosoglou 2005)
Doses multiples 10 mg per os x 14 jours (Kosoglou 2005)
Insuffisance hépatique
Dose unique de 10 mg per os (monographie)
Doses multiples de 10 mg per os x 14 jours (monographie)
Dose unique de 10 mg per os (Kosoglou 2005)
Child B (n=4) :
Child C (n=4) :
Doses multiples de 10 mg x 14 jours (Kosoglou 2005)
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Distribution |
Liaison protéique (%) :
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Métabolisme |
Métabolisme hépatique extensif
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Élimination |
Dose unique de 10 mg per os (monographie)
Dose unique de 20 mg per os (monographie)
Insuffisance hépatiqueAbsence de données |
Recommandations de la monographie |
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Aucun réglage de la posologie n’est nécessaire chez les sujets présentant une insuffisance hépatique légère. Puisqu’on ne connaît pas les effets d’une exposition accrue à l’ézétimibe chez les patients présentant une insuffisance hépatique modérée ou grave, la prise de l’ézétimibe n’est pas recommandée chez ces patients. |
Un article rédigé par Kosoglou et collaborateurs reprend les résultats de deux études tentants d’évaluer la pharmacocinétique de l’ézétimibe chez des patients cirrhotiques. Un premier protocole consistait à donner une dose de 10 mg d’ézétimibe par voie orale à des sujets contrôles (n=8) et des patients cirrhotique avec un score Child-Pugh A (n=4), avec un score Child-Pugh B (n=4) et avec un score Child-Pugh C (n=4). Les résultats montrent que, pour cet échantillon de patient, la concentration maximale moyenne des sujets sains (3,9 ng/mL) est demeurée similaire en Child A (4,1 ng/mL) mais a augmenté de 3,36 fois en Child B (13,1 ng/mL) et a augmenté de 4,15 fois en Child C (16,2 ng/mL). L’aire sous la courbe chez les sujets sains (55 ng·h/mL) était similaire à celle chez les patients Child A (76 ng·h/mL), alors qu’elle a augmentée de 5,75 fois en Child B (316 ng·h/mL) et de 4,82 fois en Child C (265 ng·h/mL). Toutefois, le temps pour atteindre la concentration maximale est resté similaire entre les différents groupes. Une deuxième étude administrait de l’ézétimibe à une dose de 10 mg une fois par jour par voie orale pendant 14 jours consécutifs à des sujets sains (n=11) et à des patients avec cirrhose modérée (CTP B, n=11). Les résultats montrent que la concentration maximale dans le groupe contrôle est augmenté par 3 fois en cirrhose modérée, passant de 7,2 ng/L à 22,3 ng/L respectivement. L’aire sous la courbe moyenne était augmentée de 3.5 fois chez les patients cirrhotiques en comparaison avec les sujets sains, observée à 341 ng·h/mL contre 93 ng·h/mL respectivement. Encore une fois, le temps pour atteindre la concentration maximale est resté similaire entre les deux groupes. Les auteurs avancent que, sur la base des résultats des 2 études, aucun ajustement ne semble nécessaire pour les patients avec insuffisance hépatique légère. Par contre, en raison des effets inconnus de l’augmentation de l’exposition à l’ézétimibe chez les patients avec une insuffisance hépatique plus avancée, ils ne recommandent pas d’utiliser l’ézétimibe en cirrhose modérée et sévère. (Kosoglou 2005)
Un rapport de cas publié par Ritchie et collaborateurs présente un cas de jaunisse sévère probablement secondaire à l’initiation de l’ézétimibe chez une patiente de 49 ans cirrhotique (score Child-Pugh inconnu), possiblement secondaire à une stéato-hépatite non-alcoolique. La patiente ne prenait pas de statine en concomitance. La jaunisse s’est développée 4 mois suivant l’initiation de l’ézétimibe (posologie non spécifiée) et s’est estompée suivant l’arrêt de l’agent. Aucun autre facteur dans le cas n’est susceptible d’être en cause dans l’épisode survenu. Les auteurs proposent de monitorer plus étroitement la fonction hépatique chez les patients avec atteinte hépatique chez qui on initie l’ézétimibe et ce, en concomitance ou non avec une statine. (Ritchie 2008)
Un autre rapport de cas publié par Kojiro et collaborateurs avance la possibilité de voir des bénéfices sur l’atteinte hépatique suivant l’administration de l’ézétimibe chez une patiente de 78 ans avec une cirrhose NASH décompensée avec ascite et un score Child-Pugh de 7 (Child B) . En effet, 21 semaines après l’initiation de l’ézétimibe l’ascite s’est résolue et son score Child a diminué à 5 (Child A). La patiente a ensuite décidé de cesser l’agent et son état s’est détérioré à nouveau. Son bilan hépatique et le contrôle de l’ascite se sont dégradés et son score Child a remonté jusqu’à 10 (Child B). La reprise de l’ézétimibe a permis de retrouver un contrôle de l’ascite et 34 semaines suivant sa reprise, le score Child-Pugh était revenu à 5 (Child A). Le bilan hépatique ne s’est pas franchement détérioré suite à l’initiation et aucun effet secondaire n’était rapporté dans l’article. (Kojiro 2009)
Peu d’études ont été retrouvées concernant la pharmacocinétique de l’ézétimibe en contexte de cirrhose. En ce qui concerne la cirrhose Child A, les paramètres pharmacocinétiques ne semblent pas altérés de façon significative et son utilisation semble donc sécuritaire dans cette population. Les données suggèrent toutefois que l’exposition à l’ézétimibe augmente d’au moins 3 à 4 fois en cirrhose modérée Child B. Finalement, il est probable que l’exposition en Child C augmente davantage, le peu de données retrouvées proposent une exposition presque pentuplée chez les cirrhotiques en comparant avec les sujets sains. (Kosoglou 2005) Étant donné l’altération importante de la pharmacocinétique en cirrhose modérée et l’absence d’informations sur les conséquences d’une augmentation de l’exposition à l’ézétimibe, nous considérons que son utilisation est non recommandé en cirrhose modérée et sévère.